Découvrir L'apron du Rhône
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L'histoire de l'apron
Des origines à aujourd'hui...
Les ancêtres de l’Apron du Rhône seraient originaires d’une zone géographique couvrant les bassins du Rhône et du Danube qui, à l’époque (il y a 8 millions d’années), n’en formaient qu’un seul. Suite à la séparation de ce bassin en deux, des aprons se sont trouvés isolés dans le bassin du Rhône et le bassin du Danube, et sont devenus des espèces à part entière : l’Apron du bassin du Rhône, Zingel asper et les aprons du bassin du Danube, Zingel zingel et Zingel streber. Cependant, l’Apron peut aussi être envisagé comme une espèce d’origine périméditerranéenne, qui aurait trouvé refuge dans le sud du bassin rhodanien suite aux différentes périodes glaciaires.
C’est-à-dire qu’à une certaine époque, les glaciers recouvrant toute la partie nord du bassin du Rhône, les aprons se seraient réfugiés dans le sud-est de la France, puis lors du retrait des glaces, celui-ci aurait à nouveau colonisé le Rhône et ses affluents ! Des études génétiques récentes ont validé cette hypothèse en mettant en évidence une diversité génétique beaucoup plus élevée sur le bassin de la Durance, foyer à partir duquel les aprons auraient recolonisé tout le bassin du Rhône et expliquant ainsi la diminution de la diversité génétique au fur et à mesure que l’on s’éloigne du bassin de la Durance.
« Suite à la séparation de ce bassin en deux, des aprons (…) sont devenus des espèces à part entière : l’Apron du bassin du Rhône, Zingel asper et les aprons du bassin du Danube, Zingel zingel et Zingel streber. »
Sur la planète, on ne trouve donc des aprons du Rhône que dans le bassin du Rhône. D’où son qualificatif d’espèce endémique. Jusqu’au début du XXe siècle, l’Apron était présent dans tout le Rhône et une grande partie de ses affluents. Désormais, l’Apron du Rhône, l’une des plus belles reliques du bassin rhodanien d’autrefois, est menacé d’extinction et ne vit plus que sur quelques rivières. Le nom « Apron » vient probablement du mot « âpre », en référence à l’âpreté de ses écailles. En Ardèche et Provence on le nommait aussi Anadelo, Ane, Asse, Varlet ou Raste. Le nom « Roi du Doubs », utilisé dans le Jura et en Suisse provient quant à lui de la désignation jurassienne « roide » ou « roué » et se rapporte à la raideur de sa posture. Dans la Saône, le Rhône ou l’Ain, l’Apron était aussi désigné par Dauphin, Sorcier ou Roi des poissons. Le terme de « Sorcier » serait justifié car d’après les rumeurs, l’Apron ne se montrerait que par mauvais temps et sa capture serait signe de mauvais présage… Le « Sorcier du Doubs » était aussi un nom utilisé, mais certains aubergistes et pêcheurs de la partie suisse du Doubs le considéraient plutôt comme porte-bonheur ; ils gardaient ainsi souvent un Apron dans leur panier de pêche ou leur vivier.
Les noms de l'apron
Différentes appellations
Le nom "Apron"
Le nom "Apron" vient probablement du mot "âpre", en référence à l'âpreté de ses écailles. En Ardèche et Provence on le nommait aussi Anadelo, Ane, Asse, Varlet ou Raste.
Le nom "Sorcier du Doubs"
Le "Sorcier du Doubs" était aussi un nom utilisé, mais certains aubergistes et pêcheurs de la partie suisse du Doubs le considéraient plutôt comme porte-bonheur ; ils gardaient ainsi souvent un Apron dans leur panier de pêche ou leur vivier.
Le nom "Roi du Doubs"
Le nom "Roi du Doubs", utilisé dans le Jura et en Suisse provient quant à lui de la désignation jurassienne "roide" ou "roué" et se rapporte à la raideur de sa posture.
Le nom de "Sorcier"
Dans la Saône, le Rhône ou l'Ain, l'Apron était aussi désigné par Dauphin, Sorcier ou Roi des poissons. Le terme de "Sorcier" serait justifié car d'après les rumeurs, l'Apron ne se montrerait que par mauvais temps et sa capture serait signe de mauvais présage…
Aspect de l'Apron
Son Aspect
De la famille des percidés (comme la perche ou le sandre), ce petit poisson dépasse rarement les 20 centimètres à l’âge adulte. Il se reconnaît à son corps allongé, le plus souvent brun-jaunâtre mais sa coloration peut également tirer sur le gris. Ses flancs sont traversés par 3 ou 4 bandes noirâtres. Son museau est long et arrondi et sa bouche se trouve en position infère (dessous). Il a un contact rugueux au toucher. Il utilise ses nageoires comme appui sur le fond du cours d’eau. Il peut parfois être confondu avec le chabot, le goujon, la perche ou encore la grémille.
Alimentation du l'Apron
Son Alimentation
L’Apron est exigeant sur la qualité de son alimentation. Il se nourrit essentiellement de larves d’insectes qu’il sélectionne soigneusement, en fonction de leur nature mais aussi de leur taille. Certaine larves d’éphéméroptère, de diptère et de trichoptère sont particulièrement consommées. Même en hiver quand les eaux sont froides, il ne ralentit pas son rythme d’alimentation, et reste actif toute l’année. Cependant, il adapte son régime alimentaire aux proies disponibles. Ses menus évoluent donc avec la quantité et la diversité de proies disponibles dans la rivière.
Où vit l'apron du Rhône ?
Son habitat
On trouve l’Apron du Rhône plutôt dans des portions de rivière à galets et graviers (parfois même, blocs épars), aux eaux moins courantes que celles de la truite commune, mais abritant des cyprinidés d’eaux vives (blageon, chevaine, spirlin, barbeau, goujon, hotu…).
Ce sont souvent des secteurs propices à la baignade ou au canoë, peu profondes et avec du courant.
De plus, l’Apron du Rhône affectionne les rivières présentant des milieux diversifiés, où alternent les zones de courants et les zones plus calmes et profondes.
En effet, il occupe des milieux différents selon son sexe, son âge ou la période de l’année (reproduction). Aux différents stades de son développement, l’apron se réfugiera dans des eaux plus ou moins courantes, plus ou moins froides et modifiera son régime alimentaire. La qualité de l’eau, même si elle semble ne pas être le facteur dominant pour le maintien des populations d’aprons, reste un élément certainement important pour la survie de l’Apron car elle a des incidences sur la nature des larves d’insectes dont il se nourrit. De par sa grande exigence vis-à-vis de la diversité de milieux qu’il affectionne selon le stade de son développement, de la connexion indispensable entre ces divers milieux, et de la nature des proies qu’il choisit pour se nourrir, l’Apron du Rhône est un témoin de premier ordre du bon fonctionnement du cours d’eau.
Reproduction de l'apron
Sa Reproduction
L’Apron se reproduit une fois par an, de février à avril en général, dans des eaux de 11°C à 14°C. La ponte est plus qualitative que quantitative : des œufs pas très nombreux mais plutôt gros (environ 2 millimètres, collés sur les cailloux du fond du cours d’eau), ce qui favorise la survie des jeunes car les larves écloses sont alors de plus grande taille. Un peu avant la reproduction, les mâles ont tendance à se regrouper dans des secteurs à galets et graviers, peu profonds et assez rapides (radier). Les femelles de grande taille se retrouvent quant à elles dans les zones plus profondes. Ce sont elles qui se déplacent vers les mâles pour pondre dans le radier. Un blocage du passage jusqu’à la frayère peut alors fortement gêner le déroulement de la fraie. Un apron vivant en moyenne 3-4 ans, il peut espérer se reproduire 1 à 2 fois ! Les aprons présentent naturellement des densités faibles sur un cours d’eau : 10 aprons sur 100 mètres de cours d’eau, c’est pas mal !
Si les regroupements de géniteurs sur les radiers sont relativement facilement observables, la fraie en elle-même n’a jamais été observée en milieu naturel.
Aussi, ses populations sont fragiles, car si la reproduction se passe mal une année, voire deux années, à cause d’une crue par exemple, détruisant les œufs ou les jeunes aprons, cela peut avoir de graves répercussions…
Les habitudes de l'apron du Rhône
Ses habitudes
L’Apron est un poisson typiquement benthique (poisson de fond) et ne se déplace que très rarement en pleine eau. Son comportement territorial, c’est-à-dire que chaque individu semble disposer d’un territoire bien marqué, fait qu’ils sont souvent séparés de plusieurs mètres les uns des autres, sauf en période de reproduction où l’on observe des regroupements d’individus.
Poisson actif surtout la nuit pour se nourrir et se reproduire, il est plus facilement observable lors de prospections nocturnes. En effet, chose étonnante, ses yeux brillent dans la nuit lorsqu’ils sont éclairés par une lampe. De jour, seuls les plus gros individus sont accessibles à des observations subaquatiques.
Son activité nocturne et sa capacité de camouflage, ont fait de l’Apron un poisson mystérieux, méconnu de tous, même des pêcheurs.
Localisation de l'apron
Sa répartition
Jusqu’au début du XXe siècle, l’Apron vivait dans le Rhône et une grande partie de ses affluents sur environ 2 200 kilomètres de cours d’eau alors qu’aujourd’hui son linéaire de répartition est estimé à 365 km.
Les deux plus grosses populations sont situées sur le bassin de l’Ardèche et sur le bassin de la Durance. Il subsiste également dans le Verdon en amont du lac de Sainte-Croix, sur la Loue et en suisse sur la boucle du Doubs. Ces deux populations semblent régresser depuis quelques années, particulièrement celle du Doubs où les observations d’aprons se font de plus en plus rares. Enfin, à la suite d’une stratégie de réintroduction qui s’est terminée en 2018, l’apron est de nouveau présent sur la rivière Drôme.
Aperçu des populations d’aprons du Rhône :
- la population de la Loue.
- la population du bassin de l'Ardèche (Ardèche, Beaume et Chassezac).
- la population du bassin de la Durance (Durance, Buëch, Jabron, Asse, Sasse) et celle du Verdon, déconnectée de la Durance.
- la population de la Drôme, issue d'une réintroduction à partir d'individus issus de la population de la Durance.
Ainsi qu’une population en Suisse :
- la population du Doubs suisse.
Quelles sont les menaces ?
Les causes et menaces de régression identifiées sont multiples:
Faute de connaissance sur les populations d’aprons, les mesures de gestion ont été inadaptées... ou inexistantes !
Les barrages et seuils ont isolé des groupes au sein de la population initiale, entraînant un une baisse de la diversité génétique des populations et réduisant donc leurs capacités d’adaptation. En effet, moins une population sera génétiquement diversifiée, moins elle pourra faire face aux changements de son environnement. De plus, sur certains secteurs des obstacles empêchent l’accès aux sites de reproduction.
Les seuils et barrages sont souvent à l'origine de la destruction d'habitats propices à de nombreuses espèces comme l'Apron en créant une retenue à l'amont qui homogénéise les habitats: ainsi d'une succession de zones rapides et lentes aux habitats diversifiés, on passe à une zone type plan d'eau, homogène, où le fond se colmate et où l'eau est susceptible de davantage s'échauffer. De plus, des aménagements hydroélectriques, en absorbant les petites crues qui "nettoient" et structurent les cours d’eau, font également disparaître certains habitats par colmatage.
Les travaux dans le lit des cours d'eau, nombreux dans le passé (curage, extraction de granulats) sont également à l'origine de la destruction d'habitats propices.
Si globalement, la qualité des eaux des rivières tendrait à s'améliorer compte tenu de leur surveillance et des actions mises en place, il n'empêche que celle-ci a pu jouer un rôle déterminant dans l'extinction de l'espèce sur certaines rivières. La vigilance doit rester de mise car des pollutions ponctuelles ont toujours lieu. De plus, nous appréhendons mal tous les effets possibles des micropolluants issus des activités de l'homme (industrie, produits phytosanitaires).
De plus la quantité et la qualité des eaux sont devenues critiques dans certains secteurs très anthropisés durant la saison estivale: baisse des niveaux d’eau et des superficies d’habitat (été sec, irrigation…), forte affluence touristique (prélèvements d'eau, difficulté de traitement des eaux usées…). Peu de débit, avec des eaux qui montent en température, des fonds qui peuvent se colmater avec les matières en suspension, le tout entrainant une baisse de la qualité de l'eau, des habitats et de la nourriture disponible.
Comment agir pour l'apron ?
Emportons nos déchets, évitons d’utiliser des produits toxiques qui se retrouvent dans les cours d’eau et limitons notre consommation d’eau, surtout en été.
Les barrages cloisonnent la rivière empêchant la libre circulation des poissons et sont souvent à l’origine d’une dégradation de la qualité de nos cours d’eau.
La suppression d’un barrage est la solution idéale mais celle-ci n’est pas toujours envisageable compte tenu d’usages qui y sont associés, la construction de passes à poissons est alors nécessaire.
Les zones courantes et peu profondes sont des milieux importants pour l’apron. Ce sont aussi des espaces qu’il faut partager avec lui en essayant de ne pas les piétiner et les modifier.
Évitons l’édification de petits barrages de galets en été : si une personne retourne un galet, les conséquences sont minimes mais si des milliers de personnes répètent cette opération, l’impact est important !
Sans le savoir, en faisant des petits barrages nous détruisons l'habitat des jeunes aprons qui deviennent alors vulnérables aux prédateurs et trouvent plus difficilement leur nourriture.
L’apron fait partie de notre patrimoine, c’est une espèce emblématique du bassin du Rhône, présente nulle par ailleurs !
Un geste pour l’apron, c’est un geste pour l’ensemble des espèces qui l’accompagnent.
En protégeant l’apron, ce sont nos rivières que nous préservons et de ce fait, les activités et usages qui y sont liés (ressource en eau de qualité, tourisme, pêche…).
Statuts de protection
Statut
L’Apron du Rhône est inscrit depuis 1990 sur la liste rouge mondiale des espèces menacées dressée par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN). A l’heure actuelle, il est classé « En danger d’extinction » à l’échelle nationale et « En danger critique d’extinction » à l’échelle mondiale.
En 2017, l’apron du Rhône est en tête de liste des espèces prioritaires de France métropolitaine pour l’action publique d’après « La liste hiérarchisée d’espèces pour la conservation en France ». cette liste est établie par l’Office Français de la Biodiversité (OFB), Le Muséum National d’Histoire Naturel (MNHN) et le Centre National pour la recherche Scientifique (CNRS).
- Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel de l’Europe, Conseil du 19 septembre 1979
L’Apron est inscrit à l’annexe II, en conséquence de quoi l'Apron est une espèce strictement protégée.
- Directive « habitats-faune-flore » n°92/43/CEE concernant la conservation des habitats naturels ainsi que la faune et la flore sauvage, Conseil du 21 mai 1992
L’Apron fait partie des espèces d’intérêt communautaire qui d’après la directive « nécessite la désignation de zones spéciales de conservation » (annexe II), et « nécessite une protection stricte » (annexe IV)
- Arrêté du 8 décembre 1988 fixant la liste des espèces de poissons protégées sur l’ensemble du territoire national et complété par arrêté du 20 décembre 2004.
L’Apron du Rhône (Zingel asper) appartient à la liste des espèces de poissons protégées sur l’ensemble du territoire national. En conséquence de quoi sont interdits : la destruction ou l’enlèvement des œufs, la destruction, l’altération ou la dégradation des milieux particuliers, et notamment des lieux de reproduction, désignés par arrêté préfectoral.
- Arrêté du 9 juillet 1999 (en vigueur depuis le 28 août 1999, version consolidée au 30 mai 2009) fixant la liste des espèces de vertébrés protégées menacées d’extinction en France et dont l’aire de répartition excède le territoire d’un département
L’Apron du Rhône (Zingel asper) appartient à la liste des espèces de vertébrés protégées au titre de l’article L 411.1 du code de l’Environnement.
Où voir des aprons ?
La Citadelle de Besançon
Depuis 2005, la citadelle de Besançon est un partenaire important dans la sauvegarde de l'espèce. Durant le programme de préservation Life apron II (2004-2010), deux missions importantes lui ont été confiées: maitriser la reproduction artificielle de l'apron et faire découvrir cette espèce au grand public par la mise en place d'une muséographie adaptée. Aujourd'hui, ces deux missions sont toujours accomplis dans le cadre du plan national d'actions.